La tendance actuelle est à l’équipement des écoles de matériels et de ressources informatisés. On observe déjà des classes où les enseignants s’approprient activement ces nouveaux instruments, dans une orientation « usages » telle que c’est préconisé, mais aussi parfois de manière expérimentale, notamment à travers des activités spécifiquement dédiées aux technologies informatisées telles que la robotique, par exemple. Ces pratiques d’enseignants convaincus et impliqués ne sont pourtant pas la généralité. Empiriquement, on peut facilement observer que bon nombre d’enseignants sont sur la réserve, parfois en difficulté, voire dans un certain désarroi vis‐à‐vis des technologies informatisées dont on les dote. Les discours promoteurs de ces technologies gomment la réalité des contraintes et des disparités liées à l’évolution instrumentale de l’environnement scolaire.

Du côté de la formation, notamment universitaire, la situation est comparable, avec d’un côté, des discours et des intentions volontaristes d’intégration des technologies informatisées dans les pratiques de formation, et de l’autre, des enseignants qui sont soit déjà aguerris à l’usage pédagogique de ces technologies, soit en difficulté pour traduire en situation ou en accompagnement pédagogique leurs compétences techniques. Les contextes de formation à distance n’échappent pas à cette règle.

Il existe une très grande variété de postures d’évitement ou d’adoption, et de discours parfois assez éloignés de ce qu’il faudrait penser pour pouvoir réussir à engager des processus actifs d’adaptation des technologies informatisées aux pratiques d’enseignement et de formation. Nous ne sommes pas seulement différents par nos compétences techniques, nous le sommes aussi par nos modes de conceptualisations sur ces technologies, sur ce qu’il faut en apprendre, et sur ce que sont enseigner et apprendre.

Dans cette note de synthèse, en convoquant certains travaux dans mon parcours de chercheur, nous discutons des conceptualisations sur ce qu’est «enseigner avec les technologies informatisées». Nous envisageons aussi certaines dynamiques liées aux trajectoires d’appropriation instrumentale des enseignants et des futurs enseignants. Les questions de contenus à enseigner aux élèves, de statut de ces technologies en classe, de dynamiques de soutien aux enseignants, de leur formation et d’analyse de pratiques instrumentées, sont abordées dans la discussion.

Cette note de synthèse déplace et articule cet argument sur les trois volets de mon activité de chercheur: l’enseignement primaire, la formation ouverte et à distance et les espaces francophones. Tous les systèmes éducatifs ont à faire face à une forte mutation des instruments pour enseigner et se former, à l’arrivée massive d’informations, ainsi qu’à l’évolution des pratiques sociales. Autant de mouvements qui doivent nous amener à débattre encore de l’évolution des besoins d’éducation des élèves et de formation des enseignants.